Françoise Ollier, viticultrice à Fos, au sein de l’AOC Faugères, a rejoint son frère au domaine familial Ollier-Taillefer créé par ses arrière arrière grands-parents. Elle nous raconte son parcours et son implication au sein de l’association Vinifilles.
Parlez nous de votre parcours et de votre arrivée au sein du domaine familial Ollier-Taillefer
Je suis fille de vigneron, mes parents ayant dès les années 1970 repris le domaine qui appartenait aux parents de ma mère. Ce sont mes parents qui ont donné son nom au domaine Ollier-Taillefer : Ollier est le nom de mon père et Taillefer de ma mère. Avant leur arrivée au sein de la propriété, tous les vins étaient vendus en vrac et lorsque mon père a commencé à développer la vente directe (en bouteilles), il a également décidé que le nom du domaine prendrait leurs deux noms de famille et que cela ne changerait plus ! J’ai grandi au sein de la propriété, tout comme mon frère, et même si nous aimions beaucoup le travail de nos parents, nous nous étions toujours juré de ne jamais travailler en famille !
En ce qui me concerne, après des études en comptabilité puis autour de l’élaboration et de la commercialisation des vins et spiritueux à Montpellier, j’ai rejoint le syndicat de l’appellation Faugères en tant qu’animatrice du syndicat. Mon poste consistait à animer l’ensemble des vignerons du syndicat, travailler la communication de l’appellation, créer des évènements tant au niveau de l’appellation qu’au niveau national. Et trois ans plus tard, à 25 ans, j’ai été nommée directrice du syndicat.
Entre temps, mon frère s’était installé sur le vignoble familial avec nos parents. Ces derniers pensant à la retraite, mon frère me disait régulièrement que, s’il devait s’associer avec quelqu’un, il aimerait autant que cela soit avec moi ! Et c’est donc en 2003 que j’ai sauté le pas et que je l’ai rejoint. Nous avions tous les deux été à l’encontre de notre promesse. Mais je pense que c’est la clé : on ne nous a pas poussé à le faire, c’est nous qui avons choisi de revenir.
Et depuis 2020, nous avons installé la 6e génération, avec mon neveu Florent qui nous a rejoint. La relève est là !
Parlez-nous de votre domaine et des cépages que vous travaillez
Notre domaine est situé dans le nord-est de l’appellation Faugères. Nous avons 38 hectares de vignes en agriculture biologique. Dès 2001, mon frère a fait passer le domaine en Terra Vitis (certification d’une agriculture durable) et nous avons commencé la conversion bio en 2009 puis obtenu la première certification en 2012.
Nous travaillons, pour nos vins rouges et rosés, les cépages méditerranéens classiques : cinsault, grenache, syrah, mourvèdre et carignan. Et nous produisons, depuis 2004, un Faugères blanc : quatre cépages principaux (avec deux obligatoires dans l’assemblage) : roussane, marsane, vermentino et grenache blanc.
En quelques mots, nos vins sont de vrais jolis vins de gastronomie, même sur les rosés et les blancs, car nous sommes sur de petits rendements. Des tanins soyeux sur les rouges, beaucoup de gras et de minéralité sur les trois couleurs qui apportent de la fraîcheur, de l’élégance et de l’équilibre.
Et vous élaborez également une Fine Faugères ?
La Fine Faugères, c’est l’ancêtre de l’appellation : c’est grâce à elle que l’appellation s’appelle Faugères ! Produite depuis la fin du 19e siècle, cette première eau-de-vie du Languedoc a été protégée en 1948 par une Appellation d’Origine Réglementée. La production s’est arrêtée brutalement dans les années 1970. Et nous avons relancé cette production en 2000 avec un bouilleur ambulant (l’Atelier du Bouilleur). Nous ne distillons que les vins issus de la zone de l’appellation et nous élevons les eaux de vie plus de 10 ans en barrique (XO) ce qui donne des Fines très grasses et très riches.
C’est la seule eau-de-vie du Languedoc qui était, et est de nouveau, distillée dans un alambic à repasse. Nous sommes une dizaine de vignerons à en produire chaque année.
Les vins du Languedoc ont le vent en poupe ces dernières années, quelles sont les spécificités de l’AOC Faugères ?
La zone délimitant le terroir de Faugères a été créée en 1948, puis, en 1955, le vignoble est passé en appellation d’origine VDQS (vin délimité de qualité supérieure). L’AOC Faugères a été créée en 1982 pour les vins rouges et rosés et ce n’est qu’en 2004 que l’AOC Faugères blanc a été décrétée. C’est l’une des plus petites du Languedoc comprenant uniquement 7 villages, dont 5 de moins de 300 habitants. C’est également la seule qui est délimitée autour d’un seul terroir : le schiste. Des schistes profonds, des schistes gréseux qui vont naturellement donner de petits rendements. Un terroir qui est extrêmement qualitatif pour la vigne.
C’est une zone rurale, qui part, du sud de l’appellation, à 100 mètres d’altitude environ jusqu’au nord de l’appellation qui se situe entre 300 et 400 mètres d’altitude.
Il y a 65 vignerons indépendants au sein de l’appellation et une cave coopérative qui représente environ 45% de la production. Faugères est l’une des premières appellations à être passée en bio. Aujourd’hui, 80% des vignerons indépendants sont en bio et ceux qui ne le sont pas sont à minima certifiés Terra Vitis ou HVE (Haute Qualité Environnementale)
Vous faites partie de l’association Vinifilles créée en 2009… quels sont vos objectifs et vos projets ?
Au niveau national il existe une association qui fédère toutes les associations régionales de viticultrices : le Cercle Femmes de Vin. Les Vinifilles, association de viticultrices d’Occitanie, font donc partie de ce cercle. Créée il y a 12 ans, en 2009, à l’initiative de Pascale Rivière, de La Jasse Castel, elle a réuni autour d’elles des copines vigneronnes, des femmes qu’elle savait intéressantes et intéressées. Et aujourd’hui nous sommes 21 viticultrices. Toutes les Vinifilles que nous faisons rentrer dans l’association doivent désormais être bio (ce qui n’était pas obligatoire à la création).
Notre objectif n’est pas que commercial même si bien sûr nous réalisons des initiatives collectives de mise en avant de nos produits auprès des clients. Pendant tous ces mois de confinement par exemple, nous avons organisé des groupages tous les mois avec plusieurs domaines panachés. Cela permet de limiter les frais de transport pour les clients et de leur faire découvrir de nouvelles appellations.
C’est aussi et surtout un réseau d’entraide, de discussion. Nous sommes très complémentaires les unes avec les autres et nous faisons par exemple des formations ensemble. Nous travaillons également beaucoup auprès des écoles : écoles de sommellerie, écoles primaires pour discuter avec les enfants et les jeunes de notre métier. Nous leur expliquons ce qu’est le vin, ce qu’est la vigne. On est dans un pays ou le vin a souvent été stigmatisé et associé aux alcools forts. Il faut vraiment ré-expliquer ce qu’est notre métier, toute la richesse et le lien social qu’apporte ce métier.
crédit photo : JB Roubinet
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